L’infraction de violences volontaires peut être retenue même en l’absence de contact physique entre l’agresseur et sa victime (Cass. Crim. 04 juin 2019)

Dans un arrêt du 04 juin 2019 (lien ici), la Cour de cassation rappelle qu’un comportement de nature à impressionner vivement et à causer un choc émotif, même sans atteinte physique, est de nature à constituer le délit de violences volontaires et ce, notamment, au sens de l’article 222-11 du Code pénal, qui dispose que « les violences ayant entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours sont punies de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende ».

Cette position n’est pas récente.

Depuis la fin du dix-neuvième siècle la jurisprudence admet que les violences peuvent être purement psychologiques. Dans un célèbre arrêt du 19 février 1892 (Cass Crim DP 1892,1, 550), la Cour de cassation a posé que les violences incriminées par la loi (pourtant dénommées à l’époque « coups et blessures » ou « voies de fait ») pouvaient s’entendre de celles qui « sans atteindre matériellement la personne sont cependant de nature à provoquer une sérieuse émotion ».

Cette jurisprudence n’a fait que se renforcer et s’élargir au fil du temps.

Entre autres exemples, a pu être déclaré coupable de violences volontaires le prévenu ayant adressé par voie postale quarante-cinq lettres anonymes contenant des papiers sur lesquels étaient dessinés des croix gammées et des cercueils avec, dans certains cas, des écrits injurieux, parfois menaçants  (arrêt du 13 juin 1991 – bulletin criminel 1991, n° 253), de même que celui qui avait déposé une annonce sur le minitel rose aux termes de laquelle une jeune fille de vingt et un ans cherchait un homme viril, tout en mentionnant les nom, prénom et domicile d’une ancienne amie (arrêt du 17 juin 1992 – Bulletin criminel 1992, n° 243).

Dans un arrêt du 02 septembre 2005 (lien ici), la Cour de cassation précisait que le délit de violences volontaires peut être constitué en cas de « comportement de nature à causer sur la personne une atteinte à son intégrité physique ou psychique caractérisée par un choc émotif ou une perturbation psychologique ».

Le législateur a suivi l’évolution jurisprudentielle en remplaçant dans le Code pénal de 1994 les termes de « coups et blessures » et de « voies de fait » par ceux plus généraux de « violences volontaires ».

Enfin, rappelons que la loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010 a précisé dans l’article 222-14-3 du Code pénal que les atteintes volontaires à l’intégrité de la personne « sont réprimées quelle que soit leur nature, y compris s’il s’agit de violences psychologiques ».

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Dans le cas d’espèce, la plaignante avait dénoncé des violences physiques mais également des violences verbales sans contact, à savoir une irruption de son agresseur dans une salle des professeurs en l’insultant et l’injuriant, en heurtant violemment des casiers métalliques de rangement provoquant un bruit intense, et en faisant le mouvement de lui foncer dessus, se collant à elle en l’insultant, ce qui lui a occasionné un choc émotif et un syndrome dépressif réactionnel.

Le Tribunal correctionnel a déclaré le prévenu coupable de violences volontaires, et, sur le plan civil, l’a jugé responsable du préjudice subi par la victime, désignant un médecin expert judiciaire pour l’examiner et lui allouant une provision sur indemnisation.

La Cour d’appel de FORT DE FRANCE a, au contraire, relaxé le prévenu en retenant que les faits n’étaient pas caractérisés et a débouté la partie civile de ses demandes, en énonçant que les violences physiques reprochées n’étaient corroborées ni par des constatations médicales, ni par aucun témoignage direct.

Fidèle à sa jurisprudence, aux termes de sa décision rendue le 04 juin 2019,  la Cour de cassation a cassé l’arrêt, rappelant qu’il appartenait également aux juges de « rechercher si le comportement était de nature à impressionner vivement la partie civile et à lui causer un choc émotif susceptible de caractériser, dans la limite des faits objet de la poursuite, une faute civile ayant entraîné un préjudice direct et personnel ouvrant droit à réparation ».

La Cour de cassation souligne donc une nouvelle fois que les violences volontaires s’entendent aussi d’attitudes agressives indépendantes de tout contact.

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Force est de constater que l’infraction de violences volontaires est devenue, au fil du temps, de plus en plus formelle et comportementale, et de moins en moins liée au résultat physique dommageable observé sur la victime.

Certains le déplorent, dénonçant la porte ouverte à la partialité et à la subjectivité.

D’autres s’en félicitent, constatant l’extension de la prise en compte de toutes les composantes des préjudices subis par les victimes.

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